Bolloré-MSC, les coulisses du « deal de l’année » – Jeune Afrique


[Exclusif] Le classement 2023 des 500 champions africains

500 CHAMPIONS AFRICAINS – Comme quoi… ce qui paraît éternel trouve bien souvent une fin. Et parfois brutalement. En particulier dans le milieu des affaires. Le rachat spectaculaire des activités africaines du groupe Bolloré Transports & Logistics (BTL) par l’armateur Mediterranean Shipping Company (MSC), en est la parfaite illustration. Car qui pouvaient imaginer il y a encore quelques années que le groupe Bolloré se séparerait en si peu de temps de ce qui a longtemps constitué sa principale source de richesse, les terminaux portuaires africains ?


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 Les héritiers à la manœuvre

Il faut croire que les ennuis judiciaires qu’a connus le groupe ces dernières années n’y sont pas étrangers. Suffisants en tout cas pour pousser Vincent Bolloré à prendre le pouls du marché fin 2021. Et, au vu des premières offres, de se laisser convaincre, quelques mois seulement avant de prendre sa retraite officielle pour laisser le gouvernail à ses fils et conclure le changement de mains du plus important réseau de transports et de logistiques du continent.


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C’est d’ailleurs Cyrille, le troisième fils de Vincent Bolloré, qui s’est occupé du dossier. Avec un autre « fils de », Diego Aponte, président de MSC depuis qu’il a succédé à son père Gianluigi en 2014. Une affaire rondement menée entre les deux héritiers puisque, confirmée par Bolloré le 31 mars 2022, elle était bouclée le 21 décembre de la même année. Ce qui, pour une opération de cette envergure – 5,7 milliards d’euros et plus de 23 000 employés sur le continent – n’est après tout pas si long. A fortiori lorsqu’il s’agit d’un domaine aussi stratégique – pour ne pas dire souverain – que celle de la desserte portuaire et maritime d’un État.

Ces quelques mois de battement ont essentiellement consisté à convaincre les pouvoirs publics des pays concernés que le changement de propriétaire n’aurait aucune incidence sur le bon fonctionnement de leurs terminaux et/ou de leurs lignes ferroviaires. « Nous nous inscrirons dans les pas de Bolloré », déclarait ainsi à Jeune Afrique dès le 30 mai Diego Aponte, comme pour rassurer tout le monde.

Naissance d’un géant continental

À commencer peut-être par lui-même. Car si la première compagnie maritime mondiale gère certes en Afrique, via sa filiale portuaire TIL, les terminaux de ses hubs de transbordement à Lomé et San Pedro, elle devra maintenant diversifier ses compétences dans des ports principalement tournés vers leur hinterland, d’Abidjan à Douala, de Conakry à Pointe-Noire.

En tout, l’opérateur italo-suisse installé à Genève récupère, le long de la côte ouest-africaine, 16 terminaux à conteneurs, 7 terminaux pour trafic roulier, ainsi que 5 000 kilomètres de voies ferrées, réparties entre le Cameroun, la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, sans oublier le réseau de ports secs et d’entrepôts disséminés à travers le continent. Une infrastructure multimodale quasi unique à l’échelle du continent, qui devrait rapidement permettre à MSC et ses différentes filiales de jouer un rôle de premier plan dans le secteur du transport africain.


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Il est déjà acté que ces différentes activités, regroupées depuis 2008 sous la marque Bolloré Africa Logitics (BAL), resteront au sein d’une même entité, dont le nom devrait changer incessamment… Une entité placée au moins pour les deux prochaines années sous la direction de Philippe Labonne, jusqu’alors directeur de BTL, et dont le rôle fut central lors des négociations de rachat.

Un joli coup donc pour MSC qui, comme ses principaux concurrents, Maersk et CMA-CGM, profite de ses gigantesques bénéfices amassés depuis la fin de la pandémie de Covid pour se lancer à travers le monde dans une stratégie d’intégration verticale dans le terrestre et même l’aérien. Une stratégie qui ambitionne d’améliorer la connexion entre les marchés africains et le reste du monde, et laisse augurer une augmentation des capacités de manutention et des volumes conteneurisés. Et par voie de conséquence une baisse des tarifs portuaires ? C’est en tout cas à espérer.

Place au divertissement et à l’agriculture

Du côté de Bolloré, c’est une page qui se tourne, même si le groupe reste en Afrique à travers Canal+ et les différents développements qu’il envisage dans les secteurs de la communication et du divertissement. Pour ce qui est du transport et de la logistique, en revanche, les jours paraissent désormais comptés. À peine la vente des biens africains entérinée, la rumeur d’une cession des activités de BTL dans le monde faisait surface. CMA-CGM, contrôlé par une autre famille célèbre dans le milieu, les Saadé, aurait déjà fait part de son intérêt.


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