Hôpital, éducation, transports… Quand le délitement des services publics menace notre prospérité

Chacun s’accorde à reconnaître l’effondrement des services publics. Hôpital, éducation, transports : aucun de ces secteurs ne fonctionne comme il le devrait. L’hôpital est tellement déficient qu’il génère des pertes de chances pour les patients. Les performances de l’école française s’affaissent de classement en classement. Quant aux transports, que ce soit en raison des grèves, du manque de personnel ou du mauvais entretien des matériels comme du réseau, ils ne remplissent pas toujours leur mission de service public, qu’il s’agisse du métro, du RER, des TER et même parfois des TGV. Ce délitement des services publics menace notre prospérité, notre bien-être, notre santé.

Pour la gauche, les gouvernements successifs ont délaissé les services publics, réduit les budgets, imposé une gestion et un mode de management importés du secteur privé et non adapté au secteur public. Tout n’est pas faux dans cette auberge espagnole intellectuelle. Le secteur public est en effet doté d’une grande capacité à singer les modes managériales délétères du privé en les magnifiant : sacralisation des process, passion des réunions inutiles, multiplication des indicateurs de contrôle, obsession de la gestion budgétaire à la petite semaine… Secteur public et secteur privé sont engagés dans une sorte de concours à qui démotivera le plus ses collaborateurs. Il faut reconnaître que, si ce jeu a été commencé par le privé, le public a désormais pris une bonne longueur d’avance. Le zèle des convertis…

Seuls les pays scandinaves sont plus fonctionnarisés

Concernant les budgets, il apparaît en revanche difficile de parler de radinerie dans le cas français. La dépense publique rapportée au PIB est la plus élevée de tous les pays de l’OCDE, notre secteur public emploie 5,7 millions de personnes (6,3 millions si l’on ajoute les contrats de droit privé) : 2,5 millions au sein de l’Etat, 2 millions dans les collectivités locales, 1,2 million à l’hôpital. Ce chiffre a encore augmenté en 2021 d’après l’Insee. Cela représente 21 % de l’emploi total en France, plus que dans la plupart des pays développés (11 % en Allemagne, 13 % en Italie, 16 % au Royaume-Uni). Seuls les pays scandinaves sont plus fonctionnarisés. Il faut ajouter à cela les salariés d’entreprises publiques comme la SNCF. Le procès en radinerie est d’autant moins justifié que l’Etat apporte souvent une aide financière massive à ses rejetons. Ainsi, dans le cadre de la réforme ferroviaire de 2018, l’Etat a repris 35 milliards d’euros de la dette de SNCF Réseau et il s’est engagé à reprendre 13 milliards de la dette des hôpitaux.

Si nos services publics ne sont pas sous-dotés en argent et en effectifs, pourquoi s’effondrent-ils ? Parce qu’ils sont, plus encore que les entreprises de droit privé, soumis à des injonctions contradictoires, à une hyperinflation normative et à un statut qui empêche une gestion motivante des carrières. En dehors des fonctions régaliennes, l’Etat est le pire employeur et actionnaire qu’il est possible d’imaginer. Il multiplie les objectifs en tous sens, veut tout régenter jusqu’au moindre détail, il enferme ses employés dans un statut qui éteint toute motivation, il ratiboise puis subventionne généreusement. En fait, le problème du secteur public, c’est le secteur public lui-même, ce en quoi il faudrait revenir à une lecture libérale du rôle de l’Etat, qui brise le tabou du statut et qui se base sur le principe de subsidiarité.

Que l’Etat se concentre sur ce que le privé ne peut pas faire, en premier lieu les fonctions régaliennes. Pour le reste, apprenons à dissocier service public et secteur public. Il est par exemple rageant de voir à quel point le ministère de la Santé fait insuffisamment appel au secteur privé pour remplir des missions de service public comme les urgences hospitalières alors que nombre de cliniques sont candidates. Pourquoi ces réticences ? Le dogmatisme, point final. Le secteur public est considéré comme vertueux, le secteur privé comme impur. L’actionnaire est l’ennemi à abattre, fût-il pourvoyeur d’un capital dont nos missions de services publics auraient bien besoin. Cette réflexion sur le privé mis au service du public quand cela est possible et nécessaire (c’est loin d’être toujours le cas, ne passons pas d’un dogmatisme à l’autre) pourrait être l’un des axes programmatiques centraux du projet libéral qui voudrait améliorer concrètement le sort des Français.



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