Ce que j'ai pensé de la série "The Recruit" sur Netflix, par Christophe Donner

Je viens de finir le premier épisode de cette série en huit épisodes nouvellement disponible sur Netflix, The Recruit (La Recrue), et je l’aime déjà beaucoup, cet Owen Hendricks, un jeune avocat latino-américain, recruté par Walter Nyland, sévère mais juste patron afro-américain de la CIA, interprété par Vondie Curtis-Hall. C’est Noah Centineo qui incarne la recrue. Je peux me tromper mais, entre Owen et Walter, ça sent la relation filiale à plein nez. En attendant d’être officiellement adopté, Owen se fait bizuter par deux saletés du renseignement, des petits chefs aussi nuls que méchants. Malgré ça, Owen leur montre qui c’est le génie. Il fait tout mieux que tout le monde, ses initiatives risquées s’avèrent payantes, et toujours sans violence. Des tâches les plus ingrates qu’on lui confie, il remonte les complots les plus menaçants pour la sécurité des Etats-Unis.

Pas frimeur pour deux sous, il partage son appart avec son ex (mais ils sont toujours amoureux l’un de l’autre sans se l’avouer) et Terence, un Afro-Américain qui se balade la moitié du temps en short dans l’appart. Cette gravure de mode est narcissique et donc gay, mais bon, la façon dont les Américains prononcent le mot « cliché » est tellement attendrissante qu’on leur pardonne l’abus qu’ils en font. On frôle la sortie de route quand Terence s’allonge sur Owen, de retour de sa première mission au Yémen où il s’est fait arracher un ongle. Mais non, ça n’ira pas plus loin, ce gros câlin compassionnel servant à cocher la case gay friendly. Nada mas.

A la minute 27, petit trou d’air dans l’épisode. J’en profite pour me renseigner sur ce Noah Centineo qui envahit un peu l’écran. Il a fait ses débuts à la télé en 2009, à l’âge de 13 ans, comme vedette de The Gold Retrievers (Croc d’or en VF). En partie cachée et gâchée par une volumineuse coiffure à la Ringo (celui de Sheila, pas celui des Beatles), Noah laissait voir une frimousse de débrouillard, et, sous son sweat en éponge jaune canari, un corps d’athlète naturel qui fit fantasmer les gamines et pédophiles de cette époque bénie où Obama venait d’être élu président. A 16 ans, le petit chercheur d’or quitte sa Floride natale et abandonne ses études pour conquérir Hollywood. Apparemment, c’est fait, puisque, après dix années d’irrésistible ascension dans la hiérarchie merveilleuse de Disney Channel, il se retrouve coproducteur de The Recruit.

Maintenant que je sais tout ça, vais-je regarder la fin de l’épisode d’un œil moins complaisant ? Pas sûr. Je ne garantis pas non plus d’aller jusqu’à la fin. Ça tombe bien, car j’ai découvert que le site AlloCiné censurait les commentaires révélant la fin des films, ou le nom de l’assassin. Le critiquement correct est en place : spoiler sera bientôt un crime.

A la minute 37 du troisième épisode, Owen a pris du galon. Il est envoyé à Beyrouth. Son avion survole la Grotte aux Pigeons, un drone suit leur voiture à travers cette ville martyre qui, vue de là-haut, fait penser à Santa Barbara. Hollywood se contrefout autant du réel que de la réalité. Quant à la vérité, elle est depuis toujours indexée au budget du film. Owen passe la tête à travers la portière pour respirer l’air de la capitale du kibbeh nayyeh, il a alors ce commentaire : Really, I can feel the history, here. Et c’est alors que je vois à quel autre acteur américain il me fait penser depuis le départ : Mark Ruffalo. C’est son petit frère. Même morphologie massive, même gras naissant enrobant une nonchalante et supérieure modestie. Il a cet entêtement faussement naïf qui faisait de Mark Ruffalo, dans Spotlight, un irréprochable chasseur de prêtres pédophiles. Noah Centineo pourrait reprendre le flambeau purificateur.

N’empêche, s’il ne s’est pas passé quelque chose de plus secouant avant la fin de ce troisième épisode, je me remets à la lecture de La Mort de Danton, de Georg Büchner. Je sais comment ça finit. Je m’autospoile en toute impunité.



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