Livret A, LDDS, livrets fiscalisés… Où placer son épargne sans prendre de risque ?


La situation semble paradoxale : l’inflation pèse sur leur pouvoir d’achat, mais les Français remplissent de plus en plus leur bas de laine. D’après la Banque de France, le taux d’épargne a ainsi atteint 16,3 % des revenus au troisième trimestre 2022, contre 15 % trois ans auparavant, juste avant l’épidémie de Covid. « Avec la guerre en Ukraine et les incertitudes économiques, la peur du lendemain incite à mettre de l’argent de côté », analyse Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Epargne.

Le livret A illustre l’appétit grandissant des Français pour l’épargne puisque son encours est parvenu au niveau record de 384,7 milliards d’euros en janvier 2023 grâce à une collecte massive de plus de 9 milliards d’euros sur ce seul mois. Les épargnants se sont littéralement rués sur ce produit à l’ancienne, qui fut créé en 1818. Il est vrai que le rendement a été multiplié par 6 en un an en passant de 0,5 % à 3 %. Le taux est fixé par Bercy en fonction d’une formule de calcul tenant compte du niveau de l’inflation et des taux d’intérêt à court terme, eux-mêmes indirectement liés aux taux directeurs de la Banque centrale européenne (BCE). Deux indicateurs en forte hausse puisque l’inflation était de 6,3 % en France en rythme annuel en février, tandis que la BCE a relevé son taux directeur à 3 % en mars.

« La bonne stratégie consiste à remplir en priorité son livret A et son livret de développement durable et solidaire (LDDS), car ce sont les meilleurs placements sans risque du marché », estime Maxime Chipoy, le président de Moneyvox. Seul le livret d’épargne populaire (LEP) fait mieux, à 6,1 %, mais il est réservé aux ménages modestes sous conditions de revenus. Attention : le livret A et le LDDS rapportent tous deux 3 %, mais le premier est plafonné à 22 950 euros et ouvert à tous, tandis que le second est réservé aux contribuables (ce qui exclut les mineurs rattachés au foyer fiscal de leurs parents) et ne peut recueillir que 12 000 euros. Ces deux livrets réglementés sont également exonérés d’impôts et de charges sociales. Un atout de taille. « Il est logique de placer l’équivalent de trois à quatre mois de revenus sur des placements sans risque pour être en mesure de faire face à une dépense imprévue, mais pas plus car ils rapportent moins que l’inflation », note toutefois Maxime Chipoy.

Le détail de l’épargne précaution.

La piste des livrets fiscalisés

En effet, les épargnants s’appauvrissent en plaçant leurs liquidités sur un livret A à 3 %, quand la hausse des prix avoisine les 6 %, mais cela vaut toujours mieux que de laisser ces sommes dormir sur un compte courant non rémunéré. Reste à savoir ce que le gouvernement décidera lors de la prochaine révision du taux du livret le 1er août. « La formule de calcul devrait plaider pour une nouvelle hausse du rendement à 3,5 % car l’inflation a continué d’augmenter ces derniers mois, mais il est probable que Bercy opte plutôt pour un statu quo afin d’anticiper le reflux de la hausse des prix qui se produira au second semestre », analyse Philippe Crevel.

Le livret A et le LDDS ne suffisent pas toujours à placer son argent sans risque, notamment quand on dispose de plusieurs dizaines de milliers d’euros, par exemple après un héritage. Si l’on cherche un placement sécurisé pendant quelques mois, le temps de trouver une destination de long terme (achat immobilier, assurance-vie, épargne retraite…), il faut alors s’intéresser aux livrets fiscalisés proposés par les banques. Coupons court à tout espoir : aucun n’arrive à la cheville du livret A. En moyenne, les livrets bancaires rapportaient 0,50 % en février 2023, d’après la Banque de France. Et encore, il faut retrancher 30 % de prélèvement fiscal unique (ou, sur option, l’impôt sur le revenu au barème progressif, les prélèvements sociaux restants dus) pour obtenir la rémunération nette, soit 0,35 %. Dix fois moins que le livret A ! Le seul atout des livrets bancaires est leur quasi-absence de plafond, puisqu’il est le plus souvent possible d’y verser jusqu’à… 10 millions d’euros.

Certains livrets affichent cependant un taux bien plus attractif, en particulier grâce à des promotions offrant un rendement dopé pendant quelques mois aux nouveaux clients. C’est le cas du livret Cashbee, proposé en partenariat avec My Money Bank, qui rapporte 3 % sur les cinq premiers mois, puis 2 %, pour un rendement net de 1,74 % la première année. C’est mieux qu’ailleurs, mais largement en dessous des livrets réglementés. « Les offres promotionnelles se multiplient, mais il ne faut pas s’arrêter au taux des premiers mois : ce qui compte, c’est le rendement standard une fois la période de bonus terminée », précise Marc Tempelman, cofondateur de l’appli Cashbee.

Les banques des constructeurs automobiles, Renault Bank et PSA Banque, affichent quant à elles des taux standards à 2 %, tout comme Boursorama Banque, dont le livret est toutefois plafonné à 30 000 euros. « Nous proposons régulièrement des offres promotionnelles pour les nouveaux arrivés, mais il ne faut pas oublier nos clients historiques », indique Sarah Zamoun, responsable de Distingo chez PSA Banque. « Nous réalisons aussi des offres de fidélité pour leurs nouveaux versements ». A guetter, donc.

Le retour des comptes à terme

Il est aussi possible de placer son épargne de précaution sur un compte à terme. Dans ce cas, contrairement au livret A, au LDDS et aux livrets bancaires, le client s’engage à bloquer son épargne pendant une durée fixée à l’origine, souvent d’un à trois ans. En contrepartie, il bénéficie d’une rémunération légèrement supérieure. Tombés en désuétude ces dernières années dans un contexte de rendement au plancher, les comptes à terme font leur retour depuis quelque mois. PSA Banque propose ainsi trois produits présentant un taux annuel de 2,6 % pour un an, 2,7 % pour deux ans et 2,8 % pour trois ans. Comme pour les livrets bancaires, les intérêts sont soumis au prélèvement fiscal unique de 30 %. « Le compte à terme « un an » bénéficie de 0,6 point de rémunération supplémentaire par rapport au livret Distingo, un écart qui récompense l’engagement de détention du client sur la durée », explique Sarah Zamoun.

De son côté, Boursorama Banque propose une rémunération de 3 % brut sur 12 mois, pour un versement minimum de 30 000 euros. C’est un point de plus que son livret bancaire (2 %). Les épargnants certains de ne pas avoir besoin de cet argent pendant les douze prochains mois ont donc davantage intérêt à souscrire un compte à terme qu’un livret. Mais attention : la banque en ligne précise qu’en cas de retrait avant l’échéance, aucun intérêt ne sera versé.

Le LEP, grand gagnant

Le livret d’épargne populaire (LEP) est sans conteste le placement sans risque le plus rémunérateur du marché : depuis le 1er février 2023, il rapporte 6,1 %, toute en étant exonéré d’impôts et de contributions sociales. C’est donc le seul produit sans risque capable de préserver le pouvoir d’achat.

Tout le monde ne peut cependant pas en bénéficier puisqu’il est réservé aux foyers modestes. Pour ouvrir un LEP en 2023, il faut avoir déclaré un revenu fiscal de référence inférieur à 21 393 euros au titre de l’année 2021 pour une personne seule ou à 38 530 euros pour un couple avec un enfant – ces montants figurent sur votre avis d’imposition 2022. Théoriquement, c’est à la banque de vérifier auprès de l’administration fiscale si son client est éligible, mais dans la pratique, les établissements demandent souvent aux intéressés de présenter leur feuille d’impôt.

« L’inflation devrait progressivement se réduire pour atteindre 5 % cet été, note Maxime Chipoy, le président de MoneyVox. Le taux du LEP devrait donc être révisé à la baisse le 1er août, probablement aux environs de 5,7 % ». Un niveau qui reste attrayant et invite à verser un maximum sur ce livret plafonné à 7 700 euros.



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